JUIFS DU CAP-VERT : Des oubliés de l’Histoire

Première chose à savoir avant de parler des Juifs, c’est que le Cap-Vert est un archipel qui a été découvert par le navigateur portugais Diego Alfonso en 1460. L’État insulaire, composé de dix îles, va être peuplé par les Juifs espagnols et portugais quelques décennies plus tard. Cela à cause de l’Inquisition instaurée par le Pape IV et les rois catholiques, en 1478, visant à combattre toute forme d’hérésie. En 1492, un ultimatum est imposé par le décret de l’Alhambra. Soit la population juive se convertie, soit elle s’exile.
Une partie, appelée les marranos (signifiant « porc » en espagnol est « un terme de mépris qui assimile les convertis à des porcs dès lors qu’ils sont soupçonnés de rester fidèles au judaïsme »), reste donc en terres espagnoles et continue de pratiquer le judaïsme en secret. Les autres partent en direction du Portugal où ils retrouvent d’autres Juifs.
Au royaume du roi Manuel Ier, les Juifs locaux et exilés ne restent pas longtemps. En effet, ces derniers sont expulsés en 1496. De même que certains Juifs espagnols s’étant premièrement convertis, puis dirigés vers le Portugal par la suite.

Par conséquent, ils partent vers la France, l’Europe de l’Ouest, l’Empire Ottoman et l’Afrique du Nord. Mais aussi vers Sao Tomé-et-Principe et le Cap-Vert, des îles que les rois portugais veulent peupler. Leur but étant de bâtir un empire. Pour ce faire, le roi Manuel 1er oblige les Juifs à payer des impôts pour financer son expansion coloniale. Ceux qui n’y parviennent pas se voient être séparés de leurs enfants.
Près de 2000 enfants âgés de huit ans et moins sont déportés sur les îles de São Tomé. Certains d’entre eux ne survivent pas à cause du trajet, de la faim et des maladies. Pour les autres, ils sont forcés au baptême pour devenir catholiques. Après cela, une autre vague de la communauté juive arrive sur les îles du Cap-Vert pour fuir les persécutions.
Sur place, ils commencent à faire du commerce. On les appelle même los lançados, en portugais, signifiant « ceux qui se lancent à l’aventure ». A cause de leur statut et de l’Inquisition, les marchands juifs s’établissent au XVIe siècle en Guinée et au Sénégal où ils installent des comptoirs pour le commerce d’ivoire, d’or, de peaux et d’esclaves. 300 ans plus tard, ils sont rejoints par les Juifs du Maroc et partent s’installer sur l’île de Santo Antão dans le village de Sinagoga. Il est dit que les Juifs s’y réunissaient pour prier.
Des traces de leur présence ne se trouvent pas uniquement sur cette île, mais aussi à São Vicente, à Boa Vista et à Praia, la capitale du Cap-Vert. Aujourd’hui, il reste des cimetières juifs restaurés par les descendants de ces Capverdiens avec l’aide financière du roi du Maroc. En 2017, ces lieux ont été classés au patrimoine historique nationale de l’Etat insulaire.

Par Nicky Kabeya
Édition ROOTS Afrique de l’Ouest