MBEKO TABULA : Avocat, entrepreneur, investisseur

“Beaucoup de notre communauté ne s’autorisent pas à voir grand. […] Parallèlement à ces résignés, il y a les résilients conquérants, des femmes et des hommes
d’une grandeur et d’une ambition sans égal.”

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Mon nom Tabula, mon prénom Mbeko. 34 ans. Avocat.

Quels sont les dossiers mythiques ou médiatisés auxquels vous avez eu l’occasion de vous frotter ?
J’ai eu la chance de traiter beaucoup de dossiers passionnants, qui concernent des anonymes aux parcours de vie incroyables.
J’interviens sur des dossiers médiatiques, comme le dossier Samuel Paty, j’interviens aussi sur le dossier Pogba, je suis l’un des conseils de Mathias Pogba.
Dossier médiatique ou pas, je suis heureux, je fais ce que j’aime.

Quand on vient dans votre bureau, le ton est donné. Tableau de Toussaint Louverture, Malcolm X… Des figures noires impactantes et à vocation d’émancipation. D’où vous vient cette fibre panafricaniste ?
Le ton est donné, en réalité je suis honnête et cohérent avec mon histoire, je ne me voyais pas accrocher au mur un portait de Napoléon ou du Général de Gaulle… Soyons sérieux !
Je connais mon histoire en tant que Noir, je rends hommages à mes valeureux ancêtres et c’est normal. Toussaint Louverture et Malcolm X pour ne citer qu’eux sont des sources d’inspiration inépuisables. Tu as oublié de dire que j’ai le portait de Solitude, Nzinga et Winnie Mandela. Beaucoup de femmes sur mes tableaux, elles m’accompagnent dans mes combats du quotidien.
Cette fibre panafricaine je l’ai depuis enfant, dès l’âge de 10 ans, j’avais déjà envie de rassembler les Noirs pour développer une force intellectuelle et économique.

Avocat au verbe haut, quel a été le déclic pour vous dire que tout était possible et comment expliquez-vous que beaucoup de la diaspora continuent à se mettre des barrières mentales ?
Ce sont mes lectures qui m’ont donné l’envie d’y croire. Ce sont mes modèles, Mandela, Martin Luther King, Malcolm X, Tupac au travers de la musique, qui m’ont donné envie d’aller au bout de mes objectifs. Je dis objectif et non rêve, car les rêves c’est pour ceux qui dorment et ici on ne dort pas…
Je ne pense pas à avoir le verbe haut, j’essaie modestement de me faire comprendre. J’essaie modestement d’impacter positivement les miens. Beaucoup des nôtres n’y croient pas car on ne leur a pas suffisamment répété, pas suffisamment insufflé, cette soif d’y arriver, cette force de tout surmonter, peu importe les circonstances, les obstacles, qui se dressent on y arrivera. 7 fois à terre, 8 fois debout.
Le manque d’audace qui caractérise encore beaucoup d’hommes et de femmes de notre communauté repose sur le fait qu’ils et elles ne s’autorisent pas à y croire.
Ne s’autorisent pas à voir grand. Ils ou elles pensent que la
réussite c’est pour les autres. L’excellence c’est pour les autres. Hélas beaucoup encore pensent ainsi.
En même temps, parallèlement à ces résignés, il y a les résilients conquérants, des femmes et des hommes d’une grandeur et d’une ambition sans égal. Des femmes et des hommes qui réalisent des grandes choses, dans la médecine, la mode, les sciences humaines, le sport, l’entreprenariat, la musique, l’architecture…
Des choses qui nous rendent fiers.

“Mon agenda, c’est pousser et soutenir la dizaine d’entreprises dans lesquelles j’ai investies. ”

Sentez-vous la montée d’une conscience noire avec une clientèle soucieuse de faire travailler un avocat de la communauté ?
Oui je sens une clientèle noire de plus en plus soucieuse de sa manière de dépenser son argent et qui va volontairement me désigner comme avocat car je suis Noir.
Je le sens, dire le contraire serait une contre-vérité.
Seulement, j’ose espérer que ma couleur de peau entre en considération dans un second temps, après la question sur ma compétence.
Je pense que mes clients me désignent car, primo, ils me pensent compétent, deuxio, car je suis Noir.
Si j’étais éclaté au 8 ème sous-sol, si j’étais médiocre, Noir ou pas, ils ne m’auraient jamais confiés leurs dossiers, la défense de leurs intérêts. Jamais.
Être Noir n’est ni un sésame ni une compétence.

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Au-delà de votre profession d’avocat, vous êtes un investisseur au sein de la diaspora. Quel est votre agenda ?
Mon agenda, c’est pousser et soutenir la dizaine d’entreprises dans lesquelles j’ai investies. Apporter mes ressources pour aider à les faire grandir. Apporter de la valeur à ces sociétés du mieux que je peux. Tout cela en silence…

Parlez-nous des Funérailles des Tabous, une émission que vous co-produisez…

Les Funérailles des Tabous, c’est d’abord une aventure humaine. C’est Régis Mutombo Katalayi, qui crée cette émission, qui m’a convié à participer à ce programme. Je veux lui rendre hommage publiquement car c’est lui qui m’a tendu la main et donner l’opportunité de donner mon avis via ce support.

Ensuite, pour des raisons d’agenda et d’organisation, Régis a quitté le navire, laissant le bébé à Philippe Fabignon aka Sinaï et à moi-même, votre humble serviteur.
Philippe et moi produisons cette émission, nous essayons humblement de fournir un contenu de qualité tant sur le fond que sur la forme. L’ambition est grande, l’ambition est affichée, faire des Funérailles des Tabous l’émission phare de la communauté afro dans le monde francophone…

“ La Black Excellence, c’est un état d’esprit, c’est un mode de vie, faire les choses avec grandeur, force et dignité. ”

Black Excellence, que vous évoque cette expression. Mythe ou réalité en France ?
La Black Excellence, c’est un état d’esprit, c’est un mode de vie, faire les choses avec grandeur, force et dignité.
La perfection n’existe pas.
Seulement, nous pouvons produire du contenu, des habits, des immeubles, des plats, des chaussures en étant excellents. Cela demande de l’effort, de l’intelligence, de la rigueur, de l’exigence, du renoncement.
Oui du renoncement, renoncer à l’approximation, à la peu près, à la médiocrité, à la petitesse…
Ce n’est pas un mythe la Black Excellence, c’est une réalité, ce n’est pas une chimère, c’est une évidence pour beaucoup.
Je pense à Maïmouna de Maiwax, cette opticienne brillante, qui me confectionne mes lunettes sur mesure avec le plus grand soin. Je pense aussi à Francis Kitchen un chef cuisinier incroyable, à l’imagination débordante et au talent rare. Je pense à Marame Diao, la fondatrice de Reflète ton intérieur, une décoratrice d’intérieur de génie, qui s’occupe notamment des décors des Funérailles des Tabous, qui réalise un travail intelligent, fin et sublime.
La Black Excellence existe pour ceux et celles qui veulent voir et y croire.

Originaire de la RDC, cela représente quoi pour vous ? Avez-vous des projets à destination du Congo ?
La RDC c’est ma terre natale, Kinshasa, c’est de là où tout part.
243. J’ai plusieurs projets au Congo, en cours de réalisation…
Je n’en dirais pas plus car les résultats parleront mieux que moi en temps voulu. J’aspire à rentrer vivre sur place dans un futur proche, y vieillir et y être enterré.

Si je vous dis le mot « Roots » (racines), vous me répondez ?
Roots, c’est le socle. C’est ce qui donne du sens à mon existence. C’est ce qui définit en partie ce que je suis.
Mes racines me donnent une solidité, me rendent inébranlable à l’instar du baobab…
Je suis très ancré dans mon africanité, très attaché à mon histoire personnelle, à l’histoire de l’Afrique et de sa diaspora.
Les fourmis ne font pas de bruit comme dirait l’autre…
Je suis un résilient conquérant, déterminé à vivre à fond sa vie, sans rien attendre de mon trépas car les promesses de l’au-delà sont des promesses qui ne se vérifient pas…

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