BUMIDOM : L’émigration de la désillusion

Le Bumidom (Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’Outre-mer), créé par Michel Debré en 1963, naît dans un contexte où la France, en déclin suite à la guerre d’Algérie, est en recherche de main-d’œuvre supplémentaire. S’ajoutant à cela une période de chômage lié à la crise de l’industrie sucrière aux Antilles, quelques velléités d’indépendance ici et là… L’idée germe alors de favoriser l’émigration des Afro-descendants des départements d’outre-mer vers la France hexagonale. L’état décide donc de se tourner vers les territoires d’outre-mer, afin de pallier à son manque de main d’œuvre et rétablir la paix civile sur place.

Le Bumidom se chargeait donc de faire venir en France des travailleurs d’Outre-mer. Pour attirer ces travailleurs, le gouvernement français se basait sur des promesses de meilleures conditions de vie pour le bougre et sa famille ; une aubaine à première vue pour des personnes n’ayant eu jusqu’alors que pour seule perspective la précarité.
Ce n’est qu’une fois arrivés en métropole, qu’ils se rendent compte que cet aller est sans retour et que les promesses, incluant celle de formations qualifiées et de réussite professionnelle, n’étaient que poussière. Les emplois qu’effectuaient ces émigrés s’avèrent n’être que de simples petits boulots, souvent à la poste, dans les transports ou dans les hôpitaux.

Face à cette déception, ces émigrés doivent affronter la défiance et le mépris d’une population les mettant à l’écart, ainsi qu’un dépaysement s’accompagnant d’un climat météorologique hostile et inhabituel.

Ne supportant plus leur sort, les Antillais révoltés dénoncent en masse le Bumidom. Cette révolte se traduit par un ravage de ses locaux en 1968, garnis de graffitis exposant leurs agissements et réclamant l’indépendance des Antilles. Malgré ceci, les départs des Antilles vers la France se poursuivent jusqu’à ce que la demande de main-d’œuvre diminue. C’est ainsi que le Bumidom disparaît en 1981, laissant place à l’ANT (agence nationale pour l’insertion et la protection des travailleurs d’Outre-mer) qui deviendra à son tour LADOM (l’agence de l’Outre-mer pour la mobilité).

Du début des années 1960 au début des années 1980, plus de 85 000 Français des Antilles et de la Réunion auront été déplacés vers la métropole. Aujourd’hui encore, le mot Bumidom laisse encore un goût amer dans la gorge de nombreux ultra-marins. Toutefois, une nouvelle génération de jeunes Antillais dynamiques n’a pas vécu ce traumatisme des promesses d’antan. Elle attend simplement (et impatiemment) une politique forte et audacieuse de développement !

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