SERGE NOUKOUÉ : Fondateur de la Nollywood Week

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Serge Noukoué, d’origine béninoise. Comment définir mes activités ?
Les casquettes se sont un peu multipliées au cours du temps. Le festival Nollywood Week a clairement été un point de départ mais aujourd’hui il y a pas mal de choses. Je propose qu’on laisse les lecteurs faire leurs recherches eux-mêmes. Google ça sert à ça aussi (rires).

La Nollywood week, c’est quoi au juste ?
C’est une expérience ! Pendant 4 jours, le cœur de Paris se transforme. On est tout d’un coup téléporté du côté du Nigeria et des autres coins un peu « tendances » du continent. Pendant 4 jours on a non-seulement la possibilité de se mettre à jour en regardant sur grand écran ce qui se fait de mieux en matière de cinéma et de séries made in Africa mais, en plus, tout cela se fait en présence des créateurs, des acteurs… Le tout avec de l’afrobeat en toile de fond tout en profitant de saveurs afro qui remplacent le traditionnel pop corn. Voilà en gros ce qu’est la Nollywood Week, sans oublier qu’il s’agit d’un exercice démocratique puisqu’à travers un système de vote, le public est amené à élire le meilleur film du festival avec une remise de prix le dernier jour de l’événement.

Comment est née l’envie de créer un tel événement ?
La Nollywood Week est née en 2013 et, à cette époque-là, l’Afrique et le Nigeria en particulier étaient loin d’être les symboles de coolitude qu’ils sont aujourd’hui. Pourtant, on pouvait déjà percevoir le potentiel de cette industrie et on pouvait aussi déplorer le fait que le grand public (notamment celui issu des diasporas africaines) n’avait pas accès à un cinéma qui leur ressemblait. Certes, des films africains sortaient de manière sporadique sur les écrans français mais il ne s’agissait pas des films que notre public avait vraiment envie de voir. Ce n’était pas des films qui faisaient rêver, ni des films auxquels ils pouvaient s’identifier, et ces aspects-là étaient des aspects importants pour nous. C’est ce qui nous a poussé à nous lancer dans cette folle aventure qu’est la Nollywood Week. Tout le monde connait le rêve américain. Il était important pour nous que les diasporas africaines puissent aussi avoir accès à un rêve africain.

Votre état des lieux de l’industrie du cinéma nigérian ?
L’industrie se professionnalise et la progression de cette industrie est constante. C’est assez impressionnant et ça fait plaisir de voir cela car ça valide largement notre choix il y a 10 ans de lancer la Nollywood Week.

Selon vous, que manque-t-il aux pays francophones pour atteindre le niveau du Nigeria ?
Pas grand-chose. Peut-être un peu plus de concurrence et un peu plus d’audace… Mais ça va venir et les producteurs de cette partie du continent vont finir par trouver leur public, j’en suis persuadé.

Votre film ou série culte que vous recommanderiez à quelqu’un qui découvrirait le cinéma nigérian ?
Il y a pas mal de points d’entrée possibles selon le genre de films qu’on aime. Si on est plutôt axé films légers alors, je citerais Phone Swap qui est par ailleurs le tout premier film à avoir remporté le prix du public de la Nollywood Week mais si on est plutôt fan de thrillers alors un film comme King of Boys est plus approprié. Je pourrais aussi citer Coming from Insanity que j’aime beaucoup et qui est dans un autre registre. Voilà trois films qui, a priori, ne devraient pas décevoir les lecteurs en tout cas !

Votre actrice ou acteur culte de l’univers Nollywood ?
Il y en a plusieurs et ce n’est pas un choix facile mais s’il faut vraiment se prêter au jeu alors je dirais Richard Moffe-Damijo, plus connu sous le nom de RMD.
Il s’agit d’une légende vivante de plus de 60 ans mais qui rajeunit un peu plus chaque année et qui fait partie de cette industrie depuis qu’elle a vu le jour au début des années 90.
Il a su se ré-inventer constamment et aujourd’hui encore tout le monde se l’arrache.

Originaire de Paris, vous êtes un « repat » rentré en Afrique. Des projets audiovisuels à destination du continent ?
Oui bien sûr ! Il y a tant à faire. On a commencé avec un festival et aujourd’hui on va plus loin. On distribue, on produit et ce n’est que le début…

Si je vous le mot « Roots », cela vous évoque quoi ?
Roots, c’est la profondeur. Et d’ailleurs on voit bien ici que votre engagement pour la communauté est profond. Si ce n’était pas le cas, ça fait longtemps que vous auriez lâché l’affaire… Du coup, un grand bravo à vous pour cette longévité qui est tout sauf anecdotique.