“L’idée d’African Money est de promouvoir la « black excellence » […] montrer que les Noirs qui réussissent ne sont pas que des dealers ou footballeurs…”
Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Diawara Sékou, d’origine guinéenne, 29 ans. Je travaille dans l’évènementiel, j’ai lancé le concept African Money qui a fêté ses huit ans.
Expliquez-nous le concept d’African Money...
C’est un concept qui s’inspire du « FUBU » américain (For us by us : Pour nous par nous). African Money fait la promotion de la culture africaine. Aujourd’hui, le gros problème qui se pose est que les Africains, certes, aiment leur culture mais ne la connaissent pas. le Guinéen ne connaît pas le Congolais et vice versa… Le but d’African money était tout d’abord de promouvoir la « black excellence », nos diversités culturelles, intellectuelles et financières, et démontrer que nous avons également un fort pouvoir d’achat. L’idée est de montrer que les Noirs qui réussissent ne sont pas que des dealers ou footballeurs. Il ya également des hommes d’affaires et entrepreneurs dans la communauté noire. On organise nos soirées dans des endroits chics, pour décomplexer les Noirs et prouver que nous aussi avons le droit à des prestations de premier choix.
Les dates clé des soirées « African Money » ?
Le 4 Avril 2010, un dimanche… Je ne l’oublierai jamais, c’était la première soirée d’African Money ! Il y a eu également, en 2013 , le concept que j’ai créé : « Africa’s
Time » qui est un African Money, en plus grand. Petite anecdote lors des soirées « Africa’s Time » : lorsqu’une table commandait des grosses bouteilles et que l’on savait qu’il s’agissait, par exemple, de Maliens, on leur apportait les bouteilles avec un immense drapeau du Mali… C’était la folie et on a vu defiler toute la soirée plusieurs drapeaux du continent ! Il y a eu aussi l’année où l’on a organisé une soirée wax poussée à son extrême. Les invités portaient des vêtements très traditionnels. Par exemple, les Peulhs ne venaient pas seulement avec du wax, mais avec leurs habits traditionnels et, moi-même en tant que Guinéen, je découvrais des tenues d’un pays que je suis censé connaître par coeur. Nous avons puisé dans les profondeurs de la culture africaine, cette soirée aurait même pu s’appeler “soirée ROOTS”, mais j’ai eu peur de me faire taper sur les doigts par un bon ami (rires).
Des noms de personnalités qui ont marqué les soirées African Money ?
Je ferai d’abord remarquer que le leitmotiv de mes soirées est que le concept est roi avant les artistes. Mais si je devais en citer quelques-unes, je dirais Singuila. Il a été là depuis le début de l’aventure African money, il venait tout le temps à nos soirées et nous a toujours soutenu. Il y a aussi eu Mokobe, MHD, Booba…
Des noms de personnalités qui ont marqué les soirées African Money ?
Je ferai d’abord remarquer que le leitmotiv de mes soirées est que le concept est roi avant les célébrités. Mais si je devais en citer quelques-unes, je dirais Singuila. Il a été là depuis le début de l’aventure African money, il venait tout le temps à nos soirées et nous a toujours soutenu. Il y a aussi eu Mokobe, MHD, Booba…
Quelle est votre clientèle type ?
Notre cible est la clientèle africaine, et plus globalement ceux qui ont une attache avec l’Afrique. Je dirais que mon concept a une visée
panafricaine. Il permet indirectement de créer de la richesse dans notre communauté. Je me souviens des premières soirées où on ne mettait que du hip-hop, alors que désormais, vous pouvez y entendre toutes les musiques africaines. Un moyen de laisser la chance à tous les artistes du continent africain de rayonner.
Vous avez d’ailleurs décliné votre concept en dehors des frontières hexagonales…
J’ai décidé d’aller en Afrique pour apporter mes compétences et créer de l’emploi, bien qu’éphémère. African Money, au-delà d’un concept de soirée, c’est une idéologie. La génération nouvelle va grandir avec un nouvel idéal. Il faut se servir de notre double culture pour pouvoir avancer dans nos pays d’origine. Jusqu’à présent, African Money s’est déployé à Libreville, Yaoundé, Douala, Kinshasa, Brazzaville, Abidjan.
L’endroit qui vous a le plus marqué en Afrique ?
La Côte d’Ivoire, sans hésitation. Nous sommes tous Africains, mais tous différents. C’est un pays où les gens sont ouverts et prêts à s’amuser. Par exemple, au Cameroun, ils sont un peu plus fermés et vont préférer – hormis le hip-hop – une musique plus traditionnelle. Or, en Côte d’Ivoire, c’est le contraire, tu peux même leur mettre de la house music, ils danseront. Ces différences, il faut les savoir sinon on se loupe. Chaque pays a ses particularités. Cela me fait d’ailleurs penser à notre plus grand échec, au Gabon, où on s’est cassé la figure ! J’avais privilégié les réseaux sociaux pour faire la communication alors que c’est un pays où la promotion se fait encore à la radio, télévision et sur panneaux publicitaires. J’ai aussi fait confiance à certaines personnes là-bas, et ce n’est vraiment pas une chose à faire. Lorsque l’on organise une soirée, il faut se rendre soi-même dans le pays, pour s’y faire une idée, peaufiner son ressenti. Mais les échecs font aussi partie de la construction de la réussite.
Un conseil à donner à un lecteur qui aurait des envies de se lancer dans l’événementiel ?
Donnez-vous à fond, quoique vous fassiez ! Imprégnez-vous de la culture du pays, rendez-vous dans le pays concerné si cela se passe à l’étranger, analysez comment les gens s’amusent et ce qui les fait vibrer.
Ce numéro sera un spécial Guinée/Mali. Qu’est ce que la Guinée représente pour vous ?
La Guinée est ancrée en moi. Je suis Français, mais la Guinée c’est ma culture, mon pays de coeur. J’aimerai citer Marcus Garvey qui disait : « un peuple sans culture, c’est comme un arbre sans racine ». Il est important d’être fiers d’où nous venons. Il faut savoir pouvoir se servir de sa culture comme d’une valeur ajoutée.
Si je vous dis le mot « Roots », vous me répondez… ?
Avenir, détermination et surtout fierté. Tout Africain qui se respecte doit suivre le mouvement « Roots ».
Édition ROOTS n°21 – Spécial Mandé
Commentaires