LA PIROGUE : 1ère femme chef de Brazza

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Bumba Moseka Olivia, âgée de 37 ans, née à Kinshasa et vivant à Brazzaville. Après des études en hôtellerie, j’ai ouvert mon restaurant La Pirogue, à Brazzaville.

Racontez-nous la genèse de la Pirogue…
La Pirogue a commencé par une discussion avec ma sœur au sujet de ma passion. L’idée m’est venue d’ouvrir un restaurant. Avoir mon propre restaurant a toujours été mon objectif professionnel. Au début, j’ai voulu donner un nom typiquement africain et j’ai choisi « bouato », qui veut dire « pirogue » en lingala. Je me suis lancée, avec en tête l’idée d’un endroit cosy et chaleureux.

Quel type de cuisine rencontrera-t-on à la Pirogue ?
À La Pirogue, vous rencontrez de la cuisine avec des bases françaises et des saveurs africaines. C’est un restaurant semi-gastronomique. J’utilise pas mal de produits du pays, surtout les épices, et je mixe avec ce que j’ai appris de la cuisine française.

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Quel plat de votre carte vous rend le plus fière ?
Aucun. C’est peut-être de la prétention, mais je suis fière de tous mes plats. La cuisine, c’est de l’art, c’est aussi une passion, donc je suis fière de tout ce que je fais, tout le temps.

Vous avez eu un chef pour inspiration ?
Oui et non. Je tire mon inspiration de la vieille cuisine, la cuisine de la ménagère comme on dit. Les vieilles recettes bien cachées, les vieilles techniques sont pour moi les meilleures. Ensuite, je m’inspire beaucoup de mentors tels que Paul Bocuse, Alain Ducasse, Hélène Darroze. Je retiens une phrase que l’on nous martelait à l’école : « commencez par maîtriser le simple avant de faire du compliqué ». J’admire ces chefs qui ont eu un vrai et dur parcours professionnel, on apprend d’eux tous les jours.

Qu’est-ce qui vous différencie de la restauration existante à Brazzaville ?
Ma passion, mon amour pour mon métier. Pour moi, la cuisine, enfin mon restaurant, n’est pas qu’un lieu commercial, c’est un voyage, une histoire en bouche, d’où le nom «La Pirogue». J’invite mes clients à prendre ma pirogue et naviguer avec moi, vivre mes plats, vivre ma passion culinaire.

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Vous vous distinguez également par votre personnel…
Nous attachons une importance particulière au sérieux et professionnalisme de notre personnel. Mon secret est de leur inculquer l’amour du travail et le respect de l’individu.

Vous êtes la seule femme noire chef à Brazzaville. Est-ce une fierté ou, au contraire, est-ce inquiétant ?
C’est une fierté, oui bien sûr, mais également quelque chose d’inquiétant. Cela prouve encore que le métier est très dur pour la gente féminine, surtout en Afrique, où la place d’une femme n’est pas souvent dans les métiers de bouche, par rapport aux horaires qui sont très lourds, surtout si tu as une famille. Souvent, en Afrique, la place de la femme est au foyer. Dans la restauration, vous devez travailler tard dans la soirée, c’est très difficile d’être valorisée et acceptée au Congo.

Vous êtes originaire de Kinshasa et vivez à Brazzaville. Quelle place ses deux villes occupent-elles dans votre vie, dans votre équilibre ?
Je dis toujours « Congo mon amour », ce qui englobe les 2 Congo. Mon cœur balance entre les deux. L’amour de ma vie, mon mari, je l’ai trouvé à Brazzaville ; et mon 1er amour, mes parents, sont de la RDC.

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Si vous aviez un ami étranger au Congo qui décidait de passer 24h à Kinshasa, puis 24h à Brazzaville, que lui recommanderiez-vous ?
Viens faire un tour sur ma pirogue et ensuite je vais te présenter à ma famille culinaire. À Kinshasa, vas à « Casa Mia », « The River », « Anita »… Il y en a tellement que l’on passerait nos journées à manger (rires) !

Si vous aviez un message à adresser aux femmes congolaises, lequel serait-ce ?
Croyez en vous, en vos rêves, mettez Dieu dans vos projets. Même quand ça a l’air difficile, obstinez-vous. Réalisez vos rêves, même les plus fous, et valorisez le Congo avant tout !

Que peut-on vous souhaiter pour 2018 ?
Beaucoup de sagesse, de réussite, encore plus d’amour de ce que je fais, plus de bénédictions, plus d’amour vis-à-vis de mon prochain, plus d’idées, plus de recettes, plus de goût et surtout la force et la santé et que Dieu me comble de ses bienfaits.

Si je vous dis « ROOTS », cela vous évoque quoi ?
« Pouvoir », « Force » et surtout « Histoire », « Fondation », la base de toute chose. Merci ROOTS de nous valoriser encore et de sublimer des gens qui se battent pour une cause ou un métier.

Édition ROOTS n°20 Spécial Kongo

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