CLARISSE HIERAIX : Surdouée de la Haute-Couture

Je construis toujours mes collections autour de quatre codes qui sont mon ADN :
Les hanches dessinées, les vertugadins, les plis et les volumes.

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Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Clarisse Hieraix, 46 ans, Designer /Directrice Artistique à Paris, née à Marie-Galante en Guadeloupe. Marque éponyme :
Clarisse Hieraix.

Revenons sur votre trajectoire…
Je suis diplômée de la Chambre Syndicale de la Haute Couture Parisienne. J’ai collaboré avec des marques telles que Mme Grès, Muggler, Carven et lancé, en parallèle, ma propre ligne entre 2004 et 2009. En 2010, j’ai rencontré un partenaire financier qui m’a permis d’agrandir la structure existante et de recruter une équipe qualifiée. Nous avons élargi notre atelier avec des modélistes, des couturières, des petites mains avec le savoir-faire des grandes maisons de haute couture, ouvert cet écrin qu’est notre salon Couture près de la place de l’Etoile à Paris et développé la marque à l’internationale avec des lignes couture, robe de cocktail, robe de mariée et prêt-à-couture dans les pays tels que la Russie, le Kazakhstan, le Moyen-
Orient, l’Asie et les États-Unis.

Quel est l’ADN de votre marque ?
Je dirais que, pour chaque collection, je me raconte une histoire, autour de mon univers clivant, contrasté, mystérieux et poétique. Tout cela, je le fais au travers du regard d’un homme sur une femme. En fait, cet homme est l’homme dans l’absolu, et qui est sur le point d’être séduit et que j’emmène dans des histoires telles que : « Étrange métamorphose » en partant de l’éclosion du papillon jusqu’à son envol que j’ai retranscrit par la ponte du papillon, le cocon… Ou « Fugue en clair-obscur » où le jeu était entre l’ombre et la lumière, la transparence et la densité, j’ai travaillé autour des effets mouillés, des effets de milles feuilles… Ou « Insoumise », cette fois mon imaginaire s’est envolé sur l’attitude d’une femme libre, passionnée et dominatrice. Pour chaque histoire, je revisite les «vertugadins» qui sont les crinolines d’époque. À la base, je voulais être costumière et je crois que ça se voit. Je m’amuse à toujours la lier à une ballerine contemporaine qui m’apaise et que je transpose dans mes univers fantasmagoriques. En fait, je rêve de collaborer avec Tim Burton.

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Quel est votre process de création ?
Je crois que chaque designer a son propre process de création. Pour ma part, toutes mes collections sont dessinées trois ans à l’avance, je les découpe par saison et je les construis toujours autour de quatre codes qui sont mon ADN : Les hanches dessinées, les vertugadins, les plis et les volumes. J’affine ensuite les détails en fonction du thème avec les matières et les ennoblissements de textiles. En définitive, je dessine davantage pour les commandes couture et le sur-mesure.

Qu’est-ce qui a suscité votre intérêt pour la mode ?
La folie créative, pouvoir « rêver » et le retranscrire à travers une histoire, des matières, des ennoblissements textiles, mais surtout le challenge pour moi est de « vous » faire entrer dans mon monde et « vous » faire comprendre l’histoire que je vous raconte, et si ça je le réussis, c’est là que c’est magique !

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Vous êtes originaire de la Guadeloupe. Cela se ressentit-il d’une façon quelconque dans votre travail ?
Je suis fière d’être une femme antillaise, il est important d’avoir des repères et un retour aux sources sur mon île de Marie-Galante tous les deux ans me régénère. Cependant, lorsque je me raconte une histoire pour mes collections, mes origines n’interfèrent jamais, ni dans mon rêve ni dans mon process de création.

Beyonce, Rihanna, Lady Gaga… Je suis extrêmement flattée de savoir que ces célébrités sont entrées dans mon univers et
très émue d’avoir eu la chance de pouvoir les habiller.

Vos créations sont portées par des stars : Rihanna, Charlotte Gainsbourg, Beyonce, Georgia May Jagger, Nicky Minaj, Lady Gaga, Sonia Roland, Doutzen Kroes… Quels sont vos moments les plus marquants ?
Tous les moments m’ont marqués, je suis extrêmement flattée de savoir que ces célébrités sont entrées dans mon univers et très émue d’avoir eu la chance de pouvoir toutes les habiller.

C’est quand même un sacré exploit d’avoir sa maison de couture dans le quartier des plus grandes maisons de couture française et d’être vendue partout dans le monde. Comment réussit-on cet exploit quand, au départ, on n’est pas issu du sérail ?
Pour ma part, il est encore trop tôt pour parler de réussite. Installer une marque de luxe demande beaucoup d’années et d’investissements… Je pense qu’il n’y a pas de parcours de prédilection pour la réussite, mais il y a 3 points fondamentaux qui m’ont été essentiels :
« 1. La passion, l’amour du travail, 2. Une équipe talentueuse, solide et unies, 3. Les financiers qui m’ont permis, entre autres, d’accéder à des matières magnifiques ou de créer des ennoblissements textiles exceptionnelles, tout en gardant ma liberté créative. »
La clé de la réussite, pour moi, c’est d’avoir appris à fusionner ce tryptique : « la passion, l’équipe et les financiers ». Cela a été l’un des points les plus difficiles de ma carrière.

Vous faites partie des OVNI de la communauté caribéenne. Vous êtes très discrète, entretenez une clientèle d’élite et le grand public ne vous connaît pas forcément, alors que vous êtes l’incarnation même de la « Caribbean excellence ». Si vous deviez nous parler de vous, who is Clarisse et quel est votre principal trait de caractère ?
Difficile de parler de soi, je dirai que je suis une femme passionnée, déterminée, audacieuse, et bienveillante…. À la base, je suis quelqu’un de discrète, j’ai énormément de pudeur et je fais très peu d’interview, mais je me sens prête aujourd’hui à partager mon expérience. Je me dois d’utiliser mon parcours, pour transmettre.

Un message pour la diaspora caribéenne ?
Alors ce message que je vous énonce, Je me l’applique tous les jours depuis 26 ans. Détermination et focaliser son objectif. Croire en soi et donner le meilleur de soi dans tout ce que l’on entreprend. Être le meilleur en tout circonstance, non pas pour dépasser les autres, mais pour se dépasser soi-même. Le travail, le travail et le travail ! Il n’existe pas de réussite sans travailler. Fuyez le médiocre, l’à-peu-près, visez l’excellence voire la perfection. Il ne faut pas avoir peur de tomber, d’échouer et de se relever.

Quels sont vos projets futurs de développement ?
L’ouverture de 2 salons couture privée à Londres et à New-York.

Vous partagez cette cover avec 5 autres personnes représentant la « caribbean excellence », que cela vous évoque-t-il ?
Tout d’abord, je vous remercie d’avoir pensé à moi. C’est un honneur et encore plus pour pouvoir partager aux autres, notamment aux nouvelles générations. Il est important de montrer que l’on peut exceller dans son domaine d’activité. J’ai été enchantée de partager cette journée de shooting auprès de ces personnes inspirantes. Je connaissais déjà Harry Roselmack, mais les autres furent une très belle découverte. C’était un pur moment magique d’échange. Merci !

Si je vous dis le mot ROOTS, vous me répondez…
Force.

Édition ROOTS Karayib