Le nomadisme assimilé à la liberté, la sagesse et la simplicité, ainsi était définie la population touareg. Mystérieux de par leur voile «les seigneurs du désert» ou «hommes bleus» ont dominé pendant des centaines d’années le commerce transsaharien. Ils connaissent une vie économique liée au trafic caravanier et à l’agriculture d’oasis, une vie de nomades pastorale. Près de 1.5 millions, le peuple touareg est l’un des seuls peuples africains à avoir sa propre écriture. Du Sahara à l’Algérie, de la Lybie au Sahel ou du Niger au Burkina Faso en passant par le Mali, voici les lieux où la population touareg a posé ses bagages. Sur fond de blues touareg un peu d’alabaja, plat de base, demandé en tamasheq ou en tifinagh, leurs deux dialectiques officiels, et nous voilà plongé au cœur du désert dans lequel les Touaregs tentent d’en connaitre chaque grain de sable.
Aujourd’hui, l’histoire prend une tournure beaucoup moins chevaleresque. Et les évènements qu’ont connu les Touaregs au fils des années en cachent peut être les réponses. En 1960, le Mali et le Niger envoient des milices pour exterminer les Touaregs avec lesquels ils ne partageaient pas les revendications. En 1973 et en 1984, la domination commerciale que la population touareg connaissait autrefois est affaiblie par des famines qui entrainent la disparition de milliers de troupeaux. Conséquence : les Touaregs migrent en Libye, en Algérie et des milliers d’entre eux rejoignent l’armée de Mouammar Kadhafi. Ils sont également présents en forte majorité dans la région nord du Mali. Cependant, ayant longtemps refusé la scolarisation et l’asservissement durant la colonisation, les Touaregs se retrouvent lésés, prenant un retard conséquent sur leur développement culturel, économique, social et l’indépendance des pays africains comme le Mali ou le Niger, par la suite, accentue ce handicap. En 1994, les Touaregs condamnent l’indépendance du Mali et du Niger au détriment de la leur et refusent le tracé des nouvelles frontières. L’association des réfugiés et victimes de la répression de l’Azawad (née du massacre touareg de 1960) lance un appel à Jacques Chirac. Menacés par le rapatriement, les Touaregs revendiquent une autonomie politique, une identité culturelle et l’indépendance de l’Azawad en formant le mouvement national pour la libération de l’Azawad. Des foyers insurrectionnels éclatent de part et d’autre du Mali ainsi que des mouvements radicaux. Pourtant des accords de paix avaient été signés et devaient mener à une décentralisation et une autonomie de gestion ainsi que le désarmement et l’intégration dans le corps militaire et la fonction publique et surtout une démilitarisation de la zone nord. Mais en l’absence du respect de ces accords, les Touaregs, et plus précisément le MNLA, pour ne créer aucun amalgame, prennent d’assaut le Nord du Mali et proclament l’indépendance du territoire nord sous leur contrôle désormais. Mais à ce jour, aucun pays africain ne reconnait cette indépendance de l’Azawad, informelle et obtenue par la force. La Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), la France, l’Algérie, la Mauritanie, ou encore le Niger « souhaitent assurer l’intégrité territoriale du Mali ». Loin de la légende romanesque indigo des Touaregs, il est important de comprendre réellement aujourd’hui les attentes et intentions de ce peuple et comment ils en sont venus à troquer leurs vies de nomades pour les armes.
Par Tatiana Bayina
Édition : ROOTS n°6
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