LE NOUVEAU VISAGE DE L’ART CONTEMPORAIN
Artiste engagé, Omar Ba le prouve par son exposition Autopsie de nos consciences qui frappe un grand coup dans l’Art du Sénégal. Il transforme l’usage habituel de l’art pour en faire une fin moralisatrice. Plus qu’une histoire de culture, Omar Ba souhaite rétablir une vérité à travers les images qui seraient, selon lui, trop longtemps cachées. Ses œuvres sont inspirées du folklore, chose qu’il n’espérait pas être un atout pour un artiste africain. Les faits lui ont prouvé le contraire puisque ses peintures valent aujourd’hui entre 10 et plus de 40 000 euros.
Au départ destiné à la mécanique, il suit des études de mécanique générale dans une école technique, à Dakar, puis se forme à l’école des Beaux-Arts. Il part ensuite à Genève poursuivre son ambition, mais reste proche de sa terre natale en effectuant de nombreux allers-retours au Sénégal.
Son nom circule de plus en plus en Europe, plus particulièrement à Bruxelles, Milan, Marseille et bien sûr Genève et Dakar. Apprécié pour son adresse au pinceau, il attire aussi son public par ses messages impactants.
En 2017, Omar Ba participe à la grande exposition de la fondation Louis Vuitton : Art/Afrique, Le Nouvel Atelier. Une nouvelle chance pour lui de se faire connaître plus largement des Occidentaux, à Paris.
Né au Sénégal en 1977, Omar Ba continue d’y travailler et d’y promouvoir son travail. Il milite d’ailleurs pour un nombre d’artistes africains plus large en Europe. En 2013, il fait une exposition individuelle à Dakar à la galerie Le Manège de l’Institut Français : Pandore.
Omar Ba est le premier Africain présenté par l’un des plus grands galeristes de Paris : Daniel Templon. Il est à l’origine de l’éclosion de nombreux artistes en France comme Andy Warhol ou encore Willem de Kooning. Concernant les œuvres d’Omar Ba, il explique à TV5 Monde : « L’Afrique m’intéresse parce qu’elle a quelque chose de différent et c’est ce que j’ai trouvé dans la peinture d’Omar Ba ».
Ornées d’animaux fantastiques, de personnages hybrides et de végétations denses, ses peintures semblent à la fois personnifiées et irréelles. Il crée un univers où ses illustrations sont fictions mais aux messages réalistes. Omar Ba n’hésite pas à imposer ses critiques sur l’écologie et ses idéaux politiques, n’en déplaisent à certains. Inspiré par sa Terre natale, il ressent le besoin de se ressourcer de temps en temps : « En passant la moitié de mon temps à Dakar, je retrouve un souffle, la pulsion de la vraie vie » se confie-t-il au Figaro.
Les couleurs utilisées sur ses tableaux sur fonds bleus glacés ou noirs représentent pour la plupart l’univers coloré de l’art au Sénégal, que l’on retrouve autant dans la peinture sous verre (suwer en wolof), sur les pagnes ou autres objets d’artisanat. Une ambivalence est créée entre l’illustration des couleurs et le message sombre qui en ressort. Inspiré
par ce qu’il considère comme la déchéance politique au Sénégal et sur tout le continent, Omar Ba expose la tromperie dont serait victime le peuple par ses dirigeants. Nombreuses sont les illustrations où il laisse comprendre un système qui serait totalement corrompu et amènerait le peuple africain à sa perte, des images qui se veulent brutes pour justement éveiller les consciences, comme son nom d’exposition à la Galerie de Templon l’indique. Il ira jusqu’à faire allusion à un monde apocalyptique et en voie de destruction. L’artiste a un désir de changer les choses et le fonctionnement des mœurs en Afrique mais aussi chez les Occidentaux. En plus des œuvres, les titres de ses toiles sont aussi choisis de manière à ce que l’impact et la compréhension soient à la portée de tous, notamment avec l’œuvre « Afrique, Afrique, Afrique » où l’image de l’homme étendu sur le sol, lessivé ou peut-être mort, suscite des questions que personne n’ose se poser ; ou encore la peinture « Processus de mystification » qui malgré le mélange coloré, reflète l’horreur psychologique que subit l’Afrique.
Ce choc émotionnel est volontaire et expose un sentiment de lutte chez Omar Ba. Sur son avenir dans la peinture, l’artiste reste optimiste et, en plus de vouloir ouvrir les esprits, souhaite revendiquer une place de l’Afrique dans l’Art :
« J’ai ma place ici. Je ne vois pas pourquoi un artiste africain coûterait moins cher qu’un autre. Le fait d’être le seul artiste africain de la galerie Templon me motive encore plus pour être à la hauteur des autres. » (via LaDiplomatie).
Par Monica Belizaire
Édition ROOTS n°22 – Spécial Djolof
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