Le Code civil de la honte : le Code Noir
Le 10 mai dernier, les politiques de droite et d’extrême droite ont prôné une #déculpabilisation de l’Occident autour de l’esclavage et de la traite négrière – reprochant entre autre à la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, de ne pas chanter la Marseillaise . L’intéressée rétorquant préférer se recueillir. C’est souvent dans la gêne qu’est abordée le su- jet de la traite négrière. Il est donc essentiel de re- venir aux vérités historiques qui fondent l’Histoire de la communauté noire et qui permettent de comprendre les conséquences actuelles qui en découlent.
La loi du plus fort
« Art. 44. Déclarons les esclaves être meubles »
Le Code Noir organise l’esclavage. C’est une succession d’une soixantaine de lois, établi à la demande de Louis XIV. Il impose le baptême des esclaves noirs ( donc présence d’âme) mais légalise le châtiment corporel considérant le noir comme le patrimoine de son propriétaire. En effet, sur les registres des comptes, des maisons des grands propriétaires, on s’aperçoit que les noirs sont mis dans la même catégorie que les animaux de ferme. Le Code Noir s’applique en Amérique française, comprenant à l’époque : la Louisiane, la Martinique, la Guadeloupe, l’actuelle Haïti, et la Guyane. Arrivé bien plus tard sur les îles de la Réunion et de Madagascar, le Code Noir est appliqué pour éviter les unions mixtes entre blanc et noir, déjà bien répandu sur les îles.
«Le Code Noir interdisait aux esclaves de consommer de l’alcool.»
Aboli en 1794 par la Convention et rétabli par Napoléon, l’esclavage est non seulement une négation de l’huma- nité, mais également un moyen très lucratif pour les pro- priétaires terriens occidentaux de s’enrichir. Notamment grâce à la traite négrière et l’exploitation servile, d’une main d’œuvre déshumanisée et arrachée à leurs racines africaines. Au total des millions d’Africains sont déportés.
La menace permanente du marronnage
Les blancs présents sont minoritaires face aux millions d’esclaves présents au Antilles, c’est pourtant cette mi- norité blanche qui règnera en maître. Les «neg, marrons» des esclaves noirs en rebellions, effraient les propriétaires terriens et musèlent la liberté des esclaves, resserrent l’étreinte. La menace d’une révolte, contre l’oppresseur se précise, la révolte de Saint Domingue ( Haïti) de Toussaint Louverture, accentue cette peur d’un soulèvement. Haï- ti, chef de file de l’émancipation noir a de quoi être fier.
Le Code Noir protégerait paradoxalement les esclaves ?
Les esclaves ont néanmoins le droit d’exiger du «maître» d’être vêtus, de se marier sous l’accord du «maître», et même de se plaindre, en théorie. L’article 27 prévoit même une forme d’aide pour les plus âgés : « les esclaves infirmes par vieillesse, maladie ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront nourris et entretenus par leurs maîtres» – la pratique étant tout autre évidemment. Assoupli également, l’union de blanc Célibataire avec les esclaves noires comme l’atteste l’article 9 du Code Noir : « l’homme libre, qui n’était point marié à une autre personne durant son concubinage avec son esclave, épousera, dans les formes observées par l’Église, ladite esclave, qui sera affranchie par ce moyen, et les enfants rendus libres, et légitimes.» Une avancée ? Le reste des articles prouve malheureusement le contraire. Le Code Noir n’étant qu’une succession d’exactions perpétrées sur les esclaves en cas de vol, de fuite, d’interdiction de rassemblement , et même d’alcool ( un paradoxe quand on connaît, la ferveur antillaise pour le rhum). Les mauvais traitements infligés par les maîtres aux esclaves étaient mal perçus non pas à cause de la souffrance endurée – mais par l’aspect contre productif. Un esclave trop endommagé ne peut plus travailler aux champs. Cynisme absolu.
«Art. 44. Déclarons les esclaves être meubles»
Le Code Noir a crée une société antillaise divisée. Une hiérarchie des couleurs. «Les libres de couleurs « prennent de plus en plus de places. Le mulâtre est considéré comme un «bâtard» un «hybride» perçut comme une menace. Une véritable hiérarchie des couleurs. Des aprioris et des préjugés qui vont perdurer jusqu’aujourd’hui entre les noirs, les chabins, les métissés et les blancs des Antilles – car institutionnalisé dès le XVIIe siècle à être supérieur ou inférieur à l’autre.
Par Estelle – Audrey Ndjandjo
Édition : ROOTS n°12
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