Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Je m’appelle Jacob Desvarieux, j’ai 60 ans et suis guitariste dans un petit orchestre qui s’appelle Kassav. Je suis originaire de la Guadeloupe, ce qui signifie que, de fait, je suis africain.
Expliquez nous le cheminement de Gwada Kola. Comment un artiste musical s’oriente-t-il dans l’industrie de la boisson ?
Premier constat : le marché du disque est en train de s’écrouler et on cherche des solutions, depuis internet et le début des téléchargements en ligne. Au départ, c’était lent, c’était contraignant. Aujourd’hui, quelqu’un peut télécharger une musique en 2 secondes. Puisque l’on n’a pas légiféré dès le départ, plus personne ne veut payer pour de la musique. Cela bien aidé par les fournisseurs d’accès internet qui communiquent sur les vitesses de téléchargement de plus en plus rapide, sauf qu’ils oublient que ce qui est téléchargé sur internet ne leur appartient pas. Pour Kassav, le problème se pose moins puisqu’on est sur une clientèle qui n’est pas trop « branchée » en matière de téléchargement, vu la moyenne d’âge. Mais pour les générations d’artistes qui arrivent c’est beaucoup plus compliqué. Nous avons eu l’idée de commercialiser un soda, l’un des biens de consommation qui se vend le plus, en le rattachant à une fondation qui récupérerait 1% de chaque cannette vendue, une cagnotte qui servirait alors à investir sur des artistes émergents.
Nous ne sommes pas des producteurs, des labels… Nous allons juste aider à notre échelle les artistes guadeloupéens. Faire de la musique, du son, ils y arrivent plus moins ou moins, mais il va falloir investir sur leur travail d’image, en aidant notamment à financer des clips.
Suite à cela, nous avons cherché un nom que nous trouvions sympa et avec un bon impact marketing. Nous avons choisi la fibre identitaire, puisqu’il y a Kassav derrière. Sur l’aspect marketing nous sommes restés dans la logique de ce que nous avons fait jusqu’à maintenant. C’est un soda, nous n’avons pas inventé le soda, nous ne souhaitons pas le révolutionner. Nous sommes dans les normes de ce qui se fait de légal et je tiens à rappeler que ce n’est pas le sucre qui fait du mal mais l’excès de sucre.
Vous n’avez pas vocation à rester uniquement en Guadeloupe ?
Gwada Kola est fabriqué en Guadeloupe de A à Z pour favoriser à notre échelle l’emploi local. Nous ciblons aussi la Martinique, la Guyane, et avons déjà des propositions en Afrique, sans oublier bien sûr la France.
Nous avons eu un bon retour sur les produits, avec un accueil très chaleureux au niveau des commerçants et du public.
Pourquoi avoir gardé le même code couleur que Coca Cola ? Vous n’aviez pas peur de jouer sur la confusion ?
Nous avons décidé de faire un cola et nous savons tous qui est le leader incontesté. D’emblée, la couleur rouge renvoie à cela. Nous n’allions pas faire semblant de mettre le packaging en jaune, par exemple, pour ne pas semer de confusion. Notre objectif derrière est surtout cette fondation, vouée à aider la musique antillaise et si le leader du marché le faisait nous leur laisserions volontiers. Nous sommes aujourd’hui présents en GSM, et si on pouvait leur prendre 10 à 20% du marché ce serait déjà extraordinaire, mais nous n’avons ni le marketing, ni la puissance financière de Coca. Il y a d’autres exemples de sodas identitaires : Breizh Cola, Corsica Cola, alors pourquoi pas le Gwada Kola ?
Une distribution prochaine en Ile de France ?
La distribution en Ile de France va être lancée à la fin du printemps 2015. Nous espérons d’ailleurs que les ventes seront supérieures à celles en Guadeloupe. Vous comptez 450 000 guadeloupéens pour près de 2 millions de personnes en Ile de France, en jouant sur la fibre identitaire. Martiniquais, Guyanais, Réunionnais, Guadeloupéens, Africains et ceux qui gravitent autour d’eux et de l’image du groupe Kassav.
Si je vous dis “ROOTS”…
Quand on est noir et qu’on entend le mot “racine”, on se doit de penser à l’Afrique. Certains ont tendance à l’oublier parce qu’on ne les a pas éduqué dans ce sens…
Édition : ROOTS n°14
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