Tasi Hangbè, 1ère reine du Dahomey et fondatrice du corps militaire féminin
« Vaincre ou mourir ». C’est la devise des femmes soldats du royaume du Dahomey. Si elles sont connues aujourd’hui, c’est grâce à la reine Tasi Hangbè qui fonde ce corps militaire entre 1708 et 1711. Cette dernière accède au trône suite au décès de son frère jumeau, le roi Houessou Akaba. D’après la coutume, seuls les hommes ont la possibilité d’être rois, mais les jumeaux sont considérés comme les deux faces d’un miroir. Si l’un meurt, l’autre le remplace dans ses fonctions.
Ainsi, une femme se retrouve à la tête d’un empire. Mais elle ne veut pas être seule. Féministe, la reine Tasi Hangbè compte bien s’entourer de femmes faisant des tâches réservées aux hommes. De ce fait, elles chassent, élèvent les animaux et font de la poterie. Mais surtout, elles constituent une garde rapprochée appelée les Agoodjie signifiant « Tiens toi loin de moi » que les soldats français appellent « les Amazones » d’après les récits antiques occidentaux.
Les Agoodjie sont recrutées très jeunes parmi les esclaves. Elles sont imposantes et ont le crâne rasé. Propriétés du roi, elles vivent dans la cour royale et sont vénérées par tous les sujets. Ces derniers sont à la fois apeurés et émerveillés par ces femmes. Simplement, par leur carrure, leurs danses et leurs chants motivants avant de partir en guerre. D’ailleurs, pour maintenir leur force physique, les guerrières doivent rester vierges. Le professeur béninois Albert Bienvenu Akoha a expliqué à Franceinfo Afrique que « dans la conscience collective au Bénin, la virginité confère à la femme une force physique. Et est donc un critère de recrutement aux métiers des armes. On pensait que s’adonner à l’activité sexuelle affaiblissait le physique de la femme ». C’est la raison pour laquelle on ne peut pas toucher les Agoodjie, mais seulement les regarder de loin.
Lors du règne du roi Ghézo, les femmes soldats sont entrainées à s’adapter à tous les climats et sont placées selon une spécialité. Certaines tirent à l’arc, d’autres sont faucheuses et plusieurs surveillent la route des esclaves allant d’Abomey à Cotonou. Aux alentours de 1850, Seh-Dong-Hong-Beh dirige cette armée composée de plus de 6 000 combattantes. Leur combat le plus connu est l’assaut lancé contre la forteresse Egba d’Abeokuta (au Nigeria).
En 1892, aux côtés deu roi Behnazin (petit)fils du roi Ghezo), les Amazones entrent dans une guerre sanglante avec l’armée française et seront presque toutes exterminées. Symboles de bravoure et de sacrifice, elles sont pourtant absentes dans les manuels scolaires béninois et donc oubliées de l’histoire.
Allégorie du Wakanda
Mais, en 2018, les Amazones du Dahomey sont mises à l’honneur dans le film Black Panther réalisé par Ryan Coogler. Alors que le roi Tchalla alias Black Panther joué par le feu Chadwick Boseman rentre chez lui, au Wakanda, il est accueilli et escorté par sa garde rapprochée : Les Dora Milaje. Comme les Agoodjie, elles ont le crâne rasé, portent une armure et une lance, se battent principalement au corps-à-corps et sont fidèles à celui qui siège sur le trône. En s’inspirant des Amazones, le réalisateur a non seulement perpétué la vision féministe de la reine Tasi Hangbè, mais il a aussi montré la force de ce corps armé exclusivement féminin dans le monde entier. Au Bénin, le terme « Agoodjie » est employé pour décrire une mère célibataire ou une femme menant des activités réservées aux hommes. A l’international, on sait à présent que des guerrières ont combattus pour tout un empire !
Par Nicky Kabeya
Édition ROOTS Afrique de l’Ouest
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