« Buffalo soldier, Dreadlock rasta, There was a buffalo soldier in the heart of America… », le refrain de cette célèbre chanson interprétée par Bob Marley, a fait le tour du monde et traversé les générations dev- enant un tube planétaire et intergénérationnelle. Le musicien, feu pionnier de la musique reggae y vante le courage et le respect attribués aux Buf- falo soldiers, ces héros d’un autre temps. Vérita- bles symboles de bravoure outre-Atlantique, peu d’Européens connaissent pourtant l’histoire de ces soldats afro-américains ayant lutté pour leur liberté aux côtés de leurs propres oppresseurs. Le nom de Buffalo soldiers a été donné aux membres des premières unités militaires composées exclusivement de noirs qui ont vu le jour en 1866 aux Etats-Unis par les Kiowa, peuple amérindien. Ce terme évoque le caractère vaillant et le courage du bison, un animal sacré pour cette tribu. Ce surnom aurait trois origines diverses selon les hypothèses : il ferait soit référence aux cheveux crépus de ces soldats afro-américains rappelant la crinière du bison, soit à leur puissance et leur courage et/ou il s’agirait d’un clin d’œil aux manteaux fabriqués en peau de bison qu’ils portaient durant l’hiver. La formation de ces troupes militaires membres des 9e et 10e régiments de cavalerie ainsi que des quatre régiments d’infanterie (38e, 39e, 40e et 41e) a été précipitée par la Guerre de Sécession (1861-1865), conflit opposant les états es- clavagistes du sud aux états libres du nord aux Etats-Unis. Après cet épisode sanglant de l’Histoire américaine où plus de 620 000 soldats ont perdu la vie, le besoin de renforcer les troupes militaires se faisait ressentir afin de maintenir la sécurité des colons décidés à dominer l’ouest du territoire marquant le début de « La conquête de l’ouest ». Placés au sud-ouest des Etats-Unis ou dans les grandes Plaines, les Buffalo soldiers avaient pour charge de « veiller » au bon déroulement de la conquête de l‘Ouest par les Européens, au détriment des peuples amérindiens dont ils étaient parfois les bourreaux. Lorsqu’ils n’étaient pas au front, ils assuraient également la construction d’infrastructures telles que les routes ou lignes télégraphiques, un poste leur permet- tant de gagner leur vie avec un salaire modeste mais honorable à l’époque (13,00 $ par mois).
Au prix de la liberté, ils participèrent à de nom- breuses guerres où plus de 33 000 d’entre eux ont péri. L’histoire des Buffalo soldiers est celle d’afric- ains déracinés, qui dans un contexte ségrégation- niste ont agi dans un désir d’émancipation comme nous le rappelle la suite des paroles de « Buffalo soldiers » co-écrit par Bob Marley : « Said he was fig- ting on arrival, fighting for survival.. » [ Il s’est battu à l’arrivée, il s’est battu pour sa survie.] Une attitude qui a valu à ces premiers soldats noirs américains le respect, bien que la discrimination raciale au sein de l’armée ne fût abolie qu’en 1948 par le 33e président des Etats-Unis, Harry S. Truman.
Par Marie-France Makutungu
Édition : ROOTS n°11
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