Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
V.S : Valy Sylla, 30 ans, co-fondateur & CEO chez JAIYE – Enjoy Good Music. Originaire de la Côte d’Ivoire.
J.K : Jean-Yves Kokou, 28 ans, co-fondateur et directeur général de JAIYE – Enjoy Good Music, originaire de la Guadeloupe et du Bénin.
D.B : Désiré dit Dez Billy, 33 ans, directeur artistique de JAIYE, originaire de la Côte d’Ivoire.
Quel est votre lien ? Comment vous êtes-vous embarqués dans cette aventure entrepreneuriale ?
Valy : Jean-Yves et moi avons démarré l’aventure Jaiye sur les bancs de l’école d’ingénieur web : HETIC. Nous sortions du même cursus scolaire. Nous avions la même vision et nous avons décidé d’unir nos compétences afin de prendre part au développement de la culture africaine. C’est ainsi que “Jaiye” est né, signifiant “joie” et “espoir” en langue Yoruba. Jaiye, c’est la volonté de valoriser le patrimoine culturel musical africain. Nous souhaitons démocratiser le marché de la musique pour les auteurs-compositeurs et producteurs africains en participant à l’émergence de nouveaux talents. Mais aussi, aider les créateurs africains à s’épanouir dans leur carrière. Pour cela, nous avons développé une plateforme de distribution musicale : Jaiye Distribution. Notre force, c’est le mariage de la technologie et de la musique. Nous misons sur le tout digital afin de garantir aux artistes afro-caribéens le soutien dont ils ont besoin.
Nous avons démarré en 2016 et, aujourd’hui, nous avons un catalogue de plus de 20 000 titres distribués et cela fonctionne plutôt bien.
Nous avons, à date, propulsé de nombreux talents de la nouvelle scène musicale urbaine française tels que Bramsoo, SKG, Tiitof, CG6, L2B Gang, Minisia, Gambino la MG et bien d’autres !
Ces artistes indépendants de la diaspora afro-caribéenne génèrent des centaines de millions de streams sur l’ensemble des plateformes musicales et de téléchargements comme Spotify, Deezer, Apple Music et Youtube. Jaiye s’est aussi illustrée dans divers projets sur le continent africain. Nous avons produit et réalisé 2 titres pour l’artiste ghanéen Sarkodie « Hand to Mouth » et « Glory » qui ont fait de lui le meilleur rappeur Africain AFRIMA 2017.
Jean-Yves : Grâce à la distribution, nous avons appris à repérer les talents, à les structurer et à les mettre en avant afin de développer leurs revenus sur les plateformes de streaming. Toutefois, nous n’intervenions pas dans le processus créatif musical. Nous avons ainsi permis à un bon nombre d’artistes d’être repérés et de signer en majors. Cela nous a légitimé dans le milieu et a assis notre crédibilité auprès des artistes indépendants. Mais l’idée de Jaiye est d’aller bien plus loin que la simple distribution. Ainsi, en nous appuyant sur notre activité totalement automatisée de distributeur, nous avons mis en place notre propre label : Jaiye Music Group. Alors, nous nous sommes rapprochés de DSK On The Beat,le célèbre compositeur derrière les tubes de MHD. C’est quelqu’un avec qui j’ai grandi et été à l’école. C’est DSK qui nous présente Dez, qu’il considérait comme étant la crème des directeurs artistiques dans l’univers musical. Il a eu l’occasion d’accompagner des poids lourds tels que La Fouine, MHD et DSK On The Beat lui-même.
Il a vite compris notre vision et nos objectifs et il y a adhéré assez naturellement. Il est arrivé au bon moment.
L’idée était de se positionner sur quel genre musical ?
Valy : Au départ, il n’y avait pas forcément de granularité dans un genre spécifique, nous distribuons tout type de musiques afro-caribéennes. Nous avons un pied côté Antilles françaises et un autre sur le continent africain. La volonté, dans le développement de Jaiye, est de structurer l’industrie musicale afro-caribéenne dans son ensemble.
Après avoir fait nos preuves sur la distribution, l’objectif a été d’appliquer le savoir-faire acquis sur le développement de quelques artistes triés sur le volet que nous produisons. Mais vous l’avez compris, nous sommes plus geeks que mélomanes. Nous avions besoin d’un savoir-faire purement musical, d’où l’arrivée de Dez en tant que directeur artistique de notre jeune label Jaiye Music Group. Nous y développons nos propres artistes, un par style musical :
Limo pour l’afro; Stone Flexance pour l’urbain; Marginal pour le caribéen; Lamarre pour la pop; et des artistes en développement comme Zeteck.
Dez, quelle fut ta réaction lors de votre rencontre ?
Dez : J’ai trouvé leur approche intéressante et complémentaire parce que je ne connaissais pas tout ce qui relevait de la technologie. J’étais plus dans la production, dans le management et dans le développement d’artistes. Quand j’entends parler de tout ce qui est datas, je saisis tout de suite la portée et l’intérêt de l’apport de la technologie dans la musique. C’était nouveau pour moi. C’était une belle aventure naissante et j’ai accepté de les rejoindre sans aucune hésitation.
Valy : Avant Dez, nous étions dans une approche assez froide. De part notre formation d’ingénieur web, nous étions uniquement sur les chiffres et les statistiques, nous ne voyions la musique que par le prisme de courbes. Avec les 15 années d’expérience de Dez dans production musicale et notre expérience dans le digital, nous donnons sens à l’ADN de Jaiye : la technologie et la musique au service de la culture afro-caribéenne.
Quelle est votre vision de développement ?
Devenir le Netflix de la musique africaine. Cela passe
par :
– La distribution musicale (contrat commercial passé entre un artiste et nous afin de publier sa musique sur l’ensemble des plateformes de streaming).
– La production musicale afin de constituer un catalogue en propre.
– La diffusion sur une application de streaming en cours de développement. L’objectif est de réunir l’ensemble de la chaîne de valeurs de l’industrie musicale sur un territoire où les opportunités sont encore à faire, où il n’y a pas de plateformes de streaming et où les utilisateurs et les artistes n’ont aucun lien pour se connecter si ce n’est YouTube. Là, nous parlons uniquement de l’Afrique.
Où sont basés les artistes que vous gérez ?
Jean-Yves : En France et en Afrique. L’intérêt de partir avec des artistes qui sont en France vient du fait que nous sommes des entrepreneurs. Quand nous avons commencé Jaiye, pour prouver qu’il y avait un marché, il fallait prouver qu’il y avait un minimum d’argent sur le marché et donc il fallait émuler ce marché. Nous avons ainsi décidé de signer des artistes de la diaspora, d’abord parce que nous en faisons partie, et c’est ce qui est plus accessible. Pour vous signifier notre vision sur du long terme, je pense à un artiste comme Limo, d’origine ouest- africaine, qui est un bon exemple. Nous le développons aussi bien auprès de la diaspora mais, surtout, sur le territoire africain. Cela avance bien et nous en sommes fiers.
Mais nous ne nous arrêtons pas là, nous développons aussi des artistes en Afrique qui cumulent des millions de vues. Nous nous sommes implantés en Guinée Conakry et, au bout de deux ans, nous sommes devenus le label numéro 1 du pays grâce à notre savoir-faire et à notre formidable équipe locale dirigée par Kallo Moussa. Nous sommes aussi au Cameroun par le biais de notre directrice locale, Elisabeth Biname. Nous y avons distribué des artistes comme Petit pays, Kameni, Mr Leo et d’autres. Ce n’est que le début de l’aventure.
Valy : À l’heure actuelle, le marché africain est peu structuré. Plus de la moitié des artistes sont indépendants et, d’un autre côté, il n’y a aucun moyen d’exploitation pérenne de leurs œuvres sur place. Il n’y a pas de plateforme, en plus pour ça, il faudrait avoir des abonnements. Or, la bancarisation en Afrique est quasiment nulle donc, ce n’est pas possible de consommer via les moyens que nous connaissons en Occident. Pour avoir Apple Music, il faudrait avoir un iPhone et ensuite une carte bancaire. Ce qui exclut un bon nombre de la population. Notre focus aujourd’hui est de se concentrer sur l’acquisition du plus gros catalogue de musiques africaines et de sa structuration.
Si je vous dis ROOTS, cela t’évoque quoi ?
Dez : L’Entreprenariat.
Valy : La puissance.
Jean-Yves : La transmission du savoir.
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