Aujourd’hui lorsque l’on parle de vodu le rapport à la sorcellerie, à l’envoutement et aux rituels obscurs sataniques n’est jamais loin. Mais connaissons-nous réellement l’histoire du vodu ?
Le Vodu, appelé aussi Vodoun ou Vodou, est en réalité une religion issue du chamanisme et de l’animisme. Cette religion est abritée par un panthéon de dieux symbolisant souvent des forces de la nature, le feu, la foudre, la mer ou encore la maladie, la virilité, la tempête, ainsi qu’un Être Suprême, Mawu, créateur de tous les autres dieux, littéralement « l’inaccessible ». Il n’est jamais représenté. Chaque divinité, il en existe près de 200, fait l’objet d’un culte spécifique, avec ses prêtres et ses adeptes. Cette religion, cette culture même, se base sur une croyance en la possibilité de communiquer avec un autre monde. Afin d’entrer en contact avec ce monde, on passe par le biais d’âmes ou esprits mais aussi de morts, d’animaux (la chauve-souris, le python), d’êtres supérieurs ou de tout autre univers que celui accessible à un être humain. Parmi ses divinités, on compte la plus célèbre et la plus puissante de toutes, Mami Wata, Déesse des eaux, mais aussi Hebieso, Dieu de l’orage et de la foudre ou Erzulie Freda, Déesse de l’amour. Il est possible également de faire appel aux Lwas, divinités inférieures qui se matérialisent le plus souvent en des objets inanimés de la nature comme les pierres ou les arbres.
Le Vodu est apparu au cours du 16e siècle à la frontière entre le Bénin et le Togo, à Lado. Désormais, il est la religion que pratique 62% de la population béninoise, la grande majorité se trouvant dans le sud du pays. Et Ouidah, ville du sud du Bénin en est devenue son emblème. Ouidah est connue pour le rôle principal qu’elle a joué dans la traite des esclaves entre le 16e et le 19e siècle, où presque un million de personnes ont été embarquées sur des navires et transportées à travers l’Atlantique. Aujourd’hui, Ouidah est le centre le plus important de la religion vodu au Bénin et, probablement, dans le monde. En 1992, la ville accueillit le premier festival mondial consacré à l’art et à la culture du Vodu. Depuis 1998, le 10 janvier à Ouidah marque la traditionnelle fête du Vodu.
De multiples témoignages de cette religion sont à voir, lors de cette fête, comme le temple des Pythons. Il existe 41 divinités vodu à Ouidah et le python en est la principale. Le Temple des Pythons abrite en permanence une cinquantaine de reptiles en liberté. Le soir ils quittent le temple pour aller dans les maisons et se faire nourrir par les habitants qui les vénèrent. Le Temple des Pythons abrite par ailleurs l’autel sacré du python auprès duquel on fait un vœu, toujours à connotation positive. Ouidah conte une forêt sacrée : la forêt de Kpassé, un des endroits privilégiés du culte du vodu. Cette forêt dévoile de nombreuses légendes, dont celles des deux Cola Gigantea. « L’un est un ancien Roi de Ouidah. L’autre est le sujet principal d’un miracle qui aurait eu lieu en 1988. Cette année-là, il y eut une grande tempête qui déracina plusieurs arbres. Ce Cola gigantea n’avait pas été épargné, et les habitants décidèrent de le débiter afin de libérer le passage vers le monastère. Alors qu’ils arrivaient à la fin de leur tâche, ils s’endormirent soudainement. A leur réveil, l’arbre était de nouveau enraciné.»
Et si Ouidah est la terre mère du Vodu, Haïti en est incontestablement la fille. Héritage du Vodu d’Afrique, le Vodu haïtien a été pratiqué par les esclaves issus de la traite négrière du Dahomey en Afrique de l’ouest. Les rites vodu y sont rendus célèbres par la cérémonie du Bois-Caïman du 14 août 1791. Cette cérémonie vodu sous la direction de Boukman, chef des esclaves, sera l’acte fondateur de la révolution et de la guerre d’indépendance qui libèrera Haïti en 1804. Aujourd’hui, le vodu réunit près de 50 millions d’adeptes dans le monde : aux Etats-Unis, en Louisiane et Nouvelle Orléans, qui dispose depuis 1972 d’un « musée du vodu » et expose la tombe de Marie Laveau, fameuse prêtresse vodu née en 1794, mais également en Floride, au Brésil et en particulier dans l’Etat de Bahia, aux Antilles et bien sûr en Afrique avec le Bénin et le Togo principalement.
Mais loin du côté sombre du Vodu véhiculé par les plus récalcitrants, les paroles de l’auteur Paul.G Aclinou, donnent une autre dimension au Vodu puisque selon ses dires, «Ce qui est frappant également, c’est la pureté des concepts. En clair, cette culture présuppose que connaître reste possible, connaître le monde est une nécessité. A tel point qu’un dieu est dévolu tout entier à cette affirmation : c’est le rôle du dieu Hêbiêsso, le dieu de la foudre, qui est d’affirmer cette absolue nécessité.
Si on ne pénètre pas la signification profonde du terme, on peut massacrer autant de poulets, de coqs […] on reste dans l’idolâtrie. Cette culture enseigne également que la vie comporte des points, des pivots qui surpassent nos individualités ».
Par Tatiana Bayina
Édition : ROOTS n°8
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