GEORGIANA VIOU : Cheffe Etoilée Michelin

Dans cet entretien, Georgiana Viou nous parle de sa cuisine et de son nouveau projet au Bénin, L’AMI – Brasserie Chic Signature, dont elle signe la carte.

Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Georgiana Viou, de mère béninoise et de père nigérian.
Nationalité béninoise,
47 ans, mère de trois magnifiques enfants et cheffe cuisinière.

Revenons sur votre parcours. D’où vous est venue cette passion pour la cuisine ?
Depuis toujours, j’ai un attrait naturel pour la cuisine. Manger et faire à manger, c’est dans mes gènes ! Mais l’idée d’en faire un métier ne m’avait pas traversé l’esprit, jusqu’à ce que cela s’impose à moi comme une évidence.

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Avez-vous eu un(e) chef(fe) pour modèle ?
Si la question est de savoir si un chef m’a inspirée à embrasser cette carrière, la réponse est non.
Lorsque j’ai entrepris ma reconversion, je me suis intéressée à divers profils de chef(fe)s, mais je ne me suis identifiée à aucun en particulier.

Vous collaborez aujourd’hui avec l’un des plus beaux hôtels d’Afrique : le Sofitel Cotonou. Racontez-nous comment est né ce projet ?
Ce projet est né d’une rencontre au Vietnam en 2019.
J’étais invitée avec une dizaine de collègues pour une semaine de cuisine entre cheffes venues des cinq continents.
À cette occasion, j’ai sympathisé avec – entre autres – Anne-Cécile Degenne, qui travaillait déjà chez Accor en Asie. Lorsqu’elle a été chargée des ouvertures à l’international, et que le projet béninois a nécessité un chef extérieur pour signer la carte de cette brasserie spéciale, elle s’est souvenue que j’étais Béninoise et a trouvé que cela faisait sens. Elle m’a proposé le projet, j’ai dit oui.

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Le Sofitel Cotonou vous a-t-il donné « carte blanche » pour la composition des menus de l’AMI ou alors suivez-vous un cahier des charges ?
Les deux. J’ai carte blanche, mais avec un cadre à respecter : une cuisine d’inspiration française, des produits locaux et quelques mariages de saveurs entre les deux cultures.
Pour le moment, nous sommes sur un modèle brasserie, mais j’espère qu’à terme, nous pourrons évoluer vers un restaurant gastronomique. Qui sait ?

Comment décririez-vous votre univers culinaire ?
C’est un mélange subtil entre quelques classiques de la brasserie française et des créations mûrement réfléchies où les saveurs béninoises et françaises se rencontrent.
Des canapés aux mignardises, chaque plat raconte une histoire.
Par exemple :
 Un plat traditionnel comme l’agnan est à déguster en tartelette au cacao en guise de canapé. Le riz au lait prend des allures d’entremets et se marie à la cardamome noire et à la noix de cajou béninoise pour donner l’Amazone.
 Le mi-cuit est, paraît-il, l’un des meilleurs au monde ! Ce n’est pas moi qui le dit !
Le monyo est associé à un “piron souple”, des brochettes de langue de bœuf grillée (jusque là madeleine de Proust) et un jus de carcasses de bœuf (French touch). La joue de bœuf est servie de manière classique, avec une belle purée de pommes de terre et beaucoup d’amour.
Le poireau vinaigrette se décline en deux services :
un poireau croustillant et une sauce gribiche, la version classique en side avec de minis poireaux. Entrée plébiscitée même par ceux qui n’aiment pas le poireau.
Nous ambitionnons de changer la carte tous les trois à quatre mois, en dehors des événements spéciaux.

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Quels sont les aliments ou produits que l’on retrouve souvent dans vos plats ?
Il n’y a pas de règle stricte, mais certains ingrédients reviennent souvent.
Les saisons influencent bien sûr le choix des fruits, légumes et poissons, mais quelques éléments sont quasi incontournables dans ma cuisine :
les herbes aromatiques, le sel de Djegbadji, l’huile d’olive et l’huile de palme, l’ail, le gingembre, le poivre, les agrumes. En début de repas, nous servons un beurre doux agrémenté de zestes de citron vert et de fleur de sel, à déguster avec notre bon pain.

Que représente le Bénin pour vous ? Et en quoi cela se traduit-il dans votre cuisine ?
Petite, j’ai grandi entre culture française et béninoise. Aujourd’hui, je suis une Béninoise qui vit en France depuis plus de 25 ans.
Le Bénin, c’est mon origine, là où je suis née, où j’ai grandi. Cela représente mes racines, mes “roots”.
Et en quoi cela se traduit-il dans ma cuisine ? Avec le temps, cela m’a rattrapé. Depuis quelques années, j’ai à cœur de faire découvrir le patrimoine culinaire béninois car il vaut le détour.
A mon échelle, petit à petit, j’introduis des plats, des saveurs et des techniques pour (re)mettre en lumière cette cuisine riche et méconnue. En mai 2021, j’ai aussi publié
Le Goût de Cotonou pour contribuer à cette dynamique.

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Si je vous dis le mot “Roots”, cela vous évoque quoi ?
Les racines des arbres… Les légumes racines…