Contrôle d’identité, s’il vous plaît ?
Je m’appelle Edith Brou, Je vis à Abidjan, j’ai 32 ans, mère de 2 enfants. Je suis une entrepreneure digitale et également youtubeuse.
J’ai fondé une agence spécialisée dans les médias internet et Buzzy Africa positionné comme le Buzz Feed (ou démotivateur) africain.
Comment as-tu atterri dans l’univers du web ? Avais-tu déjà pour idée de devenir une influenceuse ?
La création me passionne depuis mon plus jeune âge et j’ai toujours eu pour souhait d’être une entrepreneure.
Mes parents n’avaient pas du tout cette vision d’avenir pour moi, ils me voyaient plutôt fonctionnaire ou enseignante en sciences économiques. J’avais pour objectif d’exercer dans le milieu publicitaire mais ils s’y sont opposés.
Par la suite, de mon côté, j’ai commencé à travailler après les cours avec ma sœur qui est productrice audiovisuelle. Je m’y suis intégrée immédiatement car c’est l’un de mes domaines d’activité favoris.
Suite à l’émergence des réseaux sociaux en 2007/2008, j’ai découvert une communauté partageant la même passion que moi pour le digital. Nous avons alors organisé des évènements afin de nous rencontrer en Afrique. Notre idée commune était que le développement d’internet pouvait permettre une baisse considérable du chômage chez les jeunes africains et donc les rendre plus indépendants économiquement et les pousser à créer leur propre métier.
En 2009, on se projetait déjà pour les 6 années à venir. Nous avons créé une association, je m’occupais de la communication du site web et c’est par ce biais que j’ai découvert mon addiction pour les réseaux sociaux et le community management. J’ai su à ce moment-là que je voulais en faire mon métier.
J’ai alors démissionné de mon travail. Ce fut compliqué avec ma famille car ils n’ont pas compris mes choix, mais la machine était déjà lancée.
Pourquoi ta famille était-elle contre ?
Ma famille ne voyait pas cela comme un métier, elle trouvait cela sans intérêt.
Aujourd’hui, leur discours a changé, ma famille est fière de moi, ils comprennent maintenant mon engouement et les bénéfices que cela m’apporte.
Suite à ma démission, une entreprise m’a laissée ma chance. J’ai débuté en tant que chef de projet web, je suis devenue community manager et j’ai tout appris sur le tas.
Durant 1 an, j’ai géré le département digital chez AOS, ensuite une agence africaine m’a débauchée et m’a donnée ma chance en tant que digital manager.
Parallèlement, j’étais bloggeuse et activiste.
Lors des deux semaines de crise sociale en Côte d’Ivoire en 2011, avec différents groupes d’activistes, nous nous sommes mobilisés afin de recueillir des informations sur les blessés, les témoins, les personnes nécessitant de l’aide grâce à nos téléphones et les réseaux sociaux.
Cet activisme a permis de mettre en avant l’utilité et la nécessité du monde digital.
Grâce à cela, tu as réussi à vraiment drainer une communauté autour de toi…
Oui en partageant mes opinions, je me suis aperçue que des gens voyaient et partageaient ce que je postais.
Au fur et à mesure, je me suis rendue compte que les gens suivaient mon actualité et s’identifiaient à certains de mes propos. Je suis devenue une sorte de référence pour eux.
En voyant l’impact que cela a eu, je me suis vraiment rendue compte que j’étais « surveillée » et devais faire attention à chaque post, à chaque chose que j’exprime.
C’est légèrement encombrant, surtout par rapport à ma vie privée, je me rends compte que je peux aussi être victime de bad buzz comme les chanteurs par exemple, car comme eux, une communauté me regarde et m’écoute. Je dois constamment surveiller mes faits et gestes.
De plus, je ne peux plus partager certains moments de ma vie privée comme ceux passés avec mes enfants parce qu’on ne sait pas qui peut tomber dessus.
Avec l’expérience, maintenant, j’arrive à gérer ma vie privée et ce que je poste sur les réseaux sociaux.
“La passion est primordiale, lorsque tu crées ton blog, car il a pour but de partager ce que tu aimes. L’aspect financier arrive bien après.”
Pourrais-tu faire un portrait-robot des personnes qui te suivent ?
C’est assez varié. Je dirais plutôt les femmes de 18 – 35 ans, surtout des Ivoiriennes mais également des Béninoises et
Sénégalaises. En les rencontrant, je me rends compte que ce que je fais n’est pas un jeu.
Penses-tu que le fait d’être une femme t’as aidé ou, au contraire, freiné dans tes démarches dans le monde digital ?
Cela m’a beaucoup aidé parce que je suis dans une phase, depuis 5 ans, où femme et IT c’est le cocktail qui fonctionne le mieux dans toutes les organisations internationales, c’est une combinaison gagnante.
On m’a associée à une image de jeune femme africaine, un peu loufoque, fan de digital. Ce qui est rare en Afrique. Cette rareté a été pour moi un réel atout car c’est cela qui m’a propulsé à ce niveau aujourd’hui.
On se dit que c’est un milieu masculin mais, au contraire, les hommes de ma communauté ont aidé et encouragé ma réussite.
Quel état des lieux ferais-tu du blogging en Côte d’Ivoire aujourd’hui ?
Pour ma part, je suis de moins en moins présente sur mon blog. J’ai créé un site d’informations et de divertissement. J’ai également une entreprise de social média spécialisée dans la création de contenus digitaux. Actuellement, je suis présidente d’une association de bloggeurs en Côte d’Ivoire. Je me rends compte que 70 % des membres sont des bloggeuses postant régulièrement et qui sont très sollicitées.
En Côte d’Ivoire, les bloggeuses sont très actives et au top de leur forme. Les bloggeuses mode et lifestyle, en particulier, attirent de nombreuses marques !
Je pourrais citer Fantastyck, Folies Mode, Orphelie Thalmas, Le blog de Sapitou, Milca Kouakou…
Pour moi, ce sont elles qui font vivre le monde des blogs en Côte d’Ivoire, mais cela n’empêche pas les nouvelles de se lancer
car il reste énormément de places à prendre. Nous sommes seulement une vingtaine à être présentes.
Si tu avais un conseil à donner à une femme ou jeune femme qui souhaiterait se lancer dans le blogging ?
La passion est primordiale, lorsque tu crées ton blog, car il a pour but de partager ce que tu aimes. L’aspect financier arrive bien après. Il faut également privilégier la qualité du contenu qui fidélise les lecteurs.
Quelle est, selon toi, la clé pour se faire connaitre ?
Tout dépend de ton objectif et de ton entourage car ils peuvent t’aider à partager tes créations, t’encourager et te permettre d’avoir une plus grande exposition.
Il faut aussi savoir prendre des risques, se faire des contacts, rencontrer des personnes importantes.
Que peut-on te souhaiter pour cette année 2017 ?
De conserver cette même énergie et de concrétiser les projets dans lesquels je me lance.
Cette année, je souhaiterais finaliser un projet que j’ai débuté en 2016 « Les 50 visages de l’Ivoire Tech » mettant en avant et rendant hommage à certains acteurs du digital qui sera disponible en format livre et un vernissage aura lieu lors de sa sortie. Je souhaite également l’émergence de ma chaine YouTube « Edith Brou TV » et pourquoi pas passer à la télévision !
Que t’évoque le mot ROOTS ?
Mon africanité, mes bases. D’où je suis ancrée et mon histoire personnelle de jeune africaine.
Édition : ROOTS n°19
Par Michael Kamdem
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