Surinam, le cas des Saamakas

Le Surinam est peu médiatisé, malgré certains ambassadeurs de poids. Si je vous dis Ruud Gullit, Frank Rijkaard, Edgar Davids, Patrick Kluivert… En bref, quasiment tous les noirs évoluant ou ayant évolué dans la sélection nationale de football des Pays-Bas sont originaires du Surinam. Cette langue de terre est encadrée par les deux fameuses Guyanes et bordé par un prestigieux voisin au sud, le Brésil. Sa vie politique a pourtant été bien agitée. Elle se confond avec celle d’un peuple en lutte, les Saramaka. Depuis 2010, il convient de les nommer « Saamakas ». Les habitants de ce petit pays, jadis colonisé par les Pays-Bas, ont supprimé la 19ème consonne de leur appellation : elle n’existe pas dans leur langue, le créole à base anglo-portugais. Ce n’est pas la première fois de son histoire, que ce groupe affirme son identité. Dès les années 60, cette particularité a frappé les anthropologues américains Richard et Sally Price. Ils s’intéressent tous deux à la question de la diaspora africaine aux États-Unis. Le pays est peuplé d’esclaves, grâce auxquels cette colonie hollandaise prospère. Ancêtres des Saamakas, ils viennent d’Afrique de l’Ouest. « Un tiers du pays de Luango (aujourd’hui Bénin, ndlr) », précisent les deux scientifiques. « Lors de leur arrivée, à peine débarqués des négriers, ils ont été mis en esclavage. Ils ont échappé au joug de leur maître en fuyant dans la forêt : ce sont des Marrons», rappelle Richard Price. Ils lutteront pour être affranchi tout au long du XVIIIè siècle. Ils seront finalement libres en 1873. Le Surinam accède à son indépendance en 1975, ce qui plonge le pays dans le chaos. En 1982, un terrible épisode se produit. Le massacre de quinze personnalités surinamiennes est perpétré, commandité par le chef militaire Desi Bouterse, actuel président de la République. Communément évoqué sous le nom de December moorden (meurtres de décembre, ndlr), les disparus avaient tous en commun d’être des intellectuels. S’ensuit une guerre civile qui dure six ans (1986-92), poussant de nombreux Saamacas à fuir vers la Guyane voisine. L’histoire du Surinam continue d’être émaillée d’incidents dans les années 90-2000.

Par Dolores Bakèla

Édition : ROOTS n°9