SHAMAMANE : Expédition au coeur de la « Terre promise » d’Afrique

La fabuleuse histoire du retour des fils d’esclaves, transportés depuis plus de 2 siècles en Amérique, qui ont décidé de retourner sur la terre de leurs ancêtres. Ce voyage en Abyssinie, ETHIOPIE ou, en amharique, Ītyōṗṗyā m’a conduit d’ADDIS ABEBA jusqu’à SHASHAMANE.

L’idée de faire ce voyage se concrétise en 2008 en côte d’ivoire, lors de notre visite dans le village rasta de VRIDI aujourd’hui détruit. Là-bas les Rasta que nous avons rencontrés, nous ont parlé  de l’Ethiopie, considérée comme la terre promise,  appelé aussi Zion (référence au mont du Temple décrit dans le livre des psaumes, comme la résidence de YAHVÉ, le lieu de la demeure royale). J’ai donc voulu pousser plus loin et voir par moi-même cette réalité qu’est le rapatriement de cette diaspora noire, suite à la prophétie de Marcus Garvey qui dit: ‘’regarder vers l’Afrique, où un roi noir sera couronné et mènera le peuple noire à sa rédemption”.

Pourquoi ont-ils acceptés de retourner sur la terre de leurs ancêtres? Ont-ils fait le bon choix? Y’a-t-il des regrets? Pourquoi l’Ethiopie? Que représente HAILE SELASIE … MARCUS GARVEY pour les rastas?

entré du camp malkouda

14 mai 2012, j’avais le choix entre partir pour NEW YORK ou KINSGTONE, mais l’ÉTHIOPIE m’attirait plus que tout. L’obsession de voir SHASHAMANE, cette terre offerte aux rastas par sa majesté HAILÉ SELASSIE était forte.

8H20, décollage de l’aéroport GDC, escale à Amsterdam. 11H20 départ d’Amsterdam pour le SOUDAN, après une escale à l’aéroport de KARTOOM, décollage pour ADDIS ABEBA, arrivée à 20H20 heure locale.

Je suis bien sur la terre d’ABYSSINIE (L’Empire d’Éthiopie également nommé Abyssinie fondé vers 990 par la dynastie Zagoué) l’un des plus vieux pays au monde.

L’ETHIOPIE est située dans la corne de l’Afrique, elle partage ses frontières avec la Somalie, le soudan, le Kenya, Djibouti et l’Erythrée. Sa capitale est ADDIS ABEBA et est située à 2.400 m d’altitude.

L’ETHIOPIE OU Ītyōṗṗyā

L’image qu’on se fait de l’Ethiopie se limite souvent à la famine, à ces petits enfants squelettiques que l’on voit dans les médias. Eh bien l’Ethiopie ce n’est plus ça. C’est le seul pays Africain à n’avoir jamais été colonisé, et ça… c’est une fierté pour tous les éthiopiens qui ne manquent aucune occasion de vous le rappeler. C’est aussi un pays de 85 millions d’habitants, donc une énorme économie potentielle, à ce titre, l’Éthiopie ambitionne d’être le prochain DUBAI d’Afrique.

site du camp

ADDIS ABEBA (nouvelle fleur)

Une capitale moderne plongée dans une verdure exceptionnelle, une ville en chantier avec ses immenses avenues, ses buldings qui sortent de terre de partout, ses églises dont les chants religieux inondent la ville.

En ethiopie c’est L’Église éthiopienne orthodoxe , très marquée par le modèle de l’Ancien testament qui domine la vie religieuse.

Sur les  hauteurs du quartier KEBENA où je suis intallée, j’observe Addis Abeba entourée de collines. La visite d’ADDIS ABEBA commence par un bon jus de fruit,  au quartier ARAKIRO. L’après midi  visite du musée où J’ai l’honneur de visiter la chambre de LUCY, (surnom du fossile AUSTRALOPITHECUS considéré comme l’espèce à l’origine de la lignée humaine).

Sur la même voie se trouve l’ancien Palais de sa Majesté HAILÉ SELASSIE devenu, en annexe, un centre de recherche de l’université D’ADDIS ABEBA. La visite de cet ancien palais, permet au visiteur de voir les appartements de sa Majesté et de son épouse, au temps de son apogée. Son lit, son secrétaire, son téléphone de chevet, ses armoires, la salle de bain, disons toute son intimité.  En bas, au rez de chaussée, ‘’the Président office’’,  son bureau où il recevait les leaders du monde entier. Disons… un endroit chargé d’émotion et d’histoire, qui fait du visiteur un privilégié pour ces quelques moments.

À Addis il fait chaud et sec, donc pas de transpiration. Pour ce déplacer, il faut utiliser les transports en commun, moins couteux (1 euros = 14 birr) et ne pas oublier de dire ‘’OVRAJ’’ (arrêt) quand on a atteint sa destination.

Pour le déjeuner, c’est le plat du pays : le ‘’INJERA’’ une espèce de grande crêpe à base de farine locale le TEFF, qui s’accompagne de légumes et de viande.

BACK TO ZION- SHASHAMANE

Après trois jours à ADDIS ABEBA, je trépigne d’impatience de voir SHASHAMANE, le but de mon voyage en Ethiopie. Shashamane est située dans la vallée du Rift en Ethiopie, à une altitude d’environ 609m  et à 251km au sud de la capitale Addis-Abeba. Shashamané (Shashämäné) est une ville de la région Oromia de près de 100.000 habitants.

Suite à la mobilisation de la diaspora noire du monde entier pour aider l’Éthiopie d’Hailé Sélassié 1er  contre l’agression italienne de 1937, 2km² de terres leur furent concédées par l’Empereur en remerciement. C’est ainsi qu’à partir de 1955 des RASTAS (essentiellement Jamaïcains), mais aussi des juifs noirs vivant en Amérique, vinrent s’installer dans la ville et regagnaient ainsi la «Terre Mère» de laquelle ils avaient été arrachés par l’entreprise esclavagiste. Cette concession territoriale ne s’adressait pas aux seuls Rastas, mais bel et bien à toute la diaspora noire.

romyk,Sandrine et alex manage du zion train lodge

RASTAS ET ETHIOPIE

L’Ethiopie ayant été le seul pays Africain à n’avoir jamais été colonisé, reste un symbole fort pour les Rastas et les noirs de la diaspora, pour qui retourner vivre en Ethiopie est synonyme de liberté comme dit Patrick Cambell. “Il a fallu un courage de lion, une grande détermination pour accomplir ce voyage, car en Jamaïque on nous a juste retirés les chaines du cou, des pieds et de mains, mais nous sommes toujours en captivité, alors qu’ici en Ethiopie je suis vraiment libre, parce que je suis chez moi”.

Marcus Garvey: Ancien journaliste, jamaïcain d’origine, grand défenseur de la cause noir, initia le rapatriement de la diaspora noire en Afrique, en créant sa compagnie maritime la ‘’Black Star liner’’, dont les premiers bénéficiaires atterrirent au Libéria et en Sierra Léone. C’est le même Marcus qui prophétisa qu’un Roi noir sera couronné en Afrique en la personne de Hailé Sélassié.Hailé Sélassié, 225ème  descendant du Roi Salomon et de la Reine de Saba… Ethiopie le seul pays africain a n’avoir jamais été colonisé, deux arguments de tailles qui ont fait dire aux noirs de la diaspora et aux Rastas, que c’était la terre promise (Sion),  que désormais ils avaient un chez eux, un lieu où ils pouvaient retourner vivre tranquillement. A Shashamane, la plupart des habitants sont arrivés par le biais de l’organisation des ‘’Douze Tribus d’Israël’’, crée par le Prophète Gad aka Dr Vernon Carrington en1967aux USA. Une organisation mondiale ouverte à toutes les races et ethnies, dans laquelle libre aux adhérents de porter des Dreadlocks ou non, de manger de la viande (sauf porc), mais de lire au moins une fois par jour un chapitre de la bible. C’est ainsi qu’à Shashamane, vous trouverez des Rastas du monde entier, de toutes les couleurs, de toutes les races.

Shashamane est une grosse ville du sud Éthiopien, verdoyante à cause des fortes pluies, proche de la frontière Kenyane, occupée à l’entrée de la ville par les noirs de la Diaspora et de l’autre côté de la ville par les Ethiopiens. La cohabitation est assez aisée, puisque pas mal de rasta sont mariés à des Ethiopiennes donc ont des enfants Ethiopiens, ce qui est un bon facteur d’intégration.

Il y a divers  communautés à Shashamane. D’un côté la french connexion qui vient des pays Francophones, de la France et ses départements d’outre-mer,  de l’autre côté les Caribéens, les Américains et Européens de toutes origines. Je n’ai pas eu l’occasion, compte tenu du séjour très court, de vérifier l’interconnexion entre les communautés.

À Shashamane existe le ‘’Nyahbinghi’’ Ordre Hashemian, dirigé par ”Sister Ijahnya” qui à l’origine a été créé par des femmes, appelées’’Bagirwas’’, qui signifiait “mort à l’oppresseur blanc et à ses alliés noirs“. A  l’origine c’était  un culte et une société secrète Centre-Africaine, active au Congo et au Kenya, dédiée à une princesse d’origine rwandaise morte en se rebellant contre l’esclavage et la colonisation.

On y trouve aussi les BOBO ASHANTI crée par Prince Emmanuel en 1958, ceux qui portent les turbans dans lequel les dreadlocks sont enfermés. Ils observent le Sabbat et la prière se fait trois fois par jour.

Le camp BOBO de Shashamane dirigé par Priest Bryan est situé sur la colline de MALKOUDA.

A Shashamane, on peut se restaurer chez Sister Joana au “ONE LOVE PLACE” et passé une bonne nuit à l’hôtel LYLLY OF VALLEY ou au ZION TRAIN LODGE tenus pas brother Alex et la sister Sandrine.

Un documentaire de 52 mn “BIG UP SHASHAMANE” a été réalisé, racontant l’histoire des hommes, femmes et enfants qui sont retournés sur la terre de leurs ancêtres. Un aperçu du documentaire peut être vu sur youtube ”Big up Shashamane”.

Le film sera projeté et suivi d’échanges lors de ‘’Universal Reggae Festival’’, organisé par APHRIKA-BEAT le 1er Décembre 2012 à Saint-Denis.

Oui le rapatriement à bel et bien eu lieu et Shashamane se veut la lumière de la nouvelle Afrique.

Par Romy.K – Aphrika-beat – 09/2012

Édition : ROOTS n°6