Guérisseurs, Marabouts & Griots

Petite encyclopédie rapide de leurs origines afin de passer moins de nuits à regarder sous le lit. Les Marabouts et les guérisseurs ont des destins plus ou moins scellés, l’un évoque un peu l’autre. Explication. Dans la société africaine, les guérisseurs étaient considérés comme des voyants, des personnages spirituels doués d’une grande sagesse. Le terme de chamans leur a souvent été attribué pour leurs aptitudes à une perception extra sensorielle passant par des pouvoirs psychiques de télépathie. Le guérisseur, tout comme le chaman, relie le monde des morts, l’au-delà, à celui des vivants par une série de transformations personnelles, parfois par l’emploi de substances psychotropes, qui altèrent la perception ou les sensations, guidé par un ancien dans une relationde Maître à Disciple. Le guérisseur était reconnu comme médecin psychique et physique. Le Marabout, quant à lui, est un sorcier ou un envoûteur, à qui l’on prête des pouvoirs de voyance et de guérison, tout comme le guérisseur. Le marabout de l’islam a inspiré ce statut puisque celui-ci était un musulman considéré comme un saint homme. Cependant, les marabouts subsahariens puisent autant dans l’islam que dans l’animisme, le chamanisme, le christianisme, le vaudou ou plus généralement la magie. La technique des Marabouts est basée sur une lecture ésotérique du Coran, avec une attention tout particulière portée sur un système de numérologie assez similaire au système de la kabbale ponctué par des bénédictions, appelées faatia, et l’évocation de génies, nommés djinns. Le griot vient compléter ce duo à travers la transmission d’un savoir ancestral, d’une sagesse qui se perpétue dans le temps et dont il est le porteur. C’est un communicateur, dépositaire de la tradition orale dans une époque où l’écriture était absente. Les griots sont une élite d’hommes et de femmes choisie de par leurs liens de sang, les djéli et djéliya chez les peuples mandingues. Le griot est recherché pour animer les fêtes en raison des connaissances qu’il a de l’histoire des familles. Il peut chanter les louanges d’une lignée ou menacer de révéler ses secrets les plus honteux. Jusqu’au 18e siècle, ils jouaient et chantaient surtout pour les nobles, mais se rendaient aussi dans les villages. Le rôle de cette caste, groupe hiérarchisé, est essentiel pour la survie de la mémoire collective. Leur valeur fondamentale a fait d’eux des confidents et conseillers des rois, des diplomates, des poètes, des musiciens et parfois des juges. Dans la légende « on ne devient pas griot on naît griot ». Dès l’enfance, le griot apprend les us et coutumes, les techniques et autres savoirs de sa caste. Les anciens griots les forment dès leur jeune âge. Pourtant aujourd’hui, nombreux sont les descendants de griots qui ignorent tout de leurs descendants et de leurs traditions. Aujourd’hui, les termes de Marabouts, de griots ou de guérisseurs sont réputés pour leur côté péjoratif voire démoniaque. Pourtant en perçant les secrets de leur histoire, on se rend compte que cette opinion est erronée.

Par Pierre Alain Nana

Édition : ROOTS n°8

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